mercredi 14 novembre 2012

Développement Durable - La préservation du bocage

Le bocage et l'aménagement du territoire


Dans les régions rurales, le bocage est un élément structurant du territoire. Depuis quelques années et sous l'impulsion de politiques de développement durable et de préservation des paysages et de la faune, de nombreux projets de plantation de haies ont vu le jour dans nos campagnes. C'est ce sujet que j'ai décidé de vous faire partager cette semaine.
Bocage en Loire-Atlantique



Histoire et état des lieux


Le bocage est un type de paysage agraire, en opposition au paysage d'openfield. Il est le résultat d'une conjugaison, celle de la nature et de la société rurale.

L'origine du bocage remonte à la période "prototype" de l'histoire de l'occident et se développe rapidement à partir du XVIIIe, conséquence de la fin des domaines nobiliaires et du partage des communaux et des grands domaines.

Le territoire français est composé de différents bocages. Chaque bocage possède son histoire et ses caractéristiques propres. Les grandes régions bocagères françaises sont le grand ouest (Bretagne, Normandie et Pays de la Loire), le Limousin, Le Bourbonnais, la Thiérache et le Pays Basque. Des zones de bocage peuvent toutefois se rencontrer dans d'autres régions.

Au XXe, la mécanisation des exploitations agricoles va bouleverser l'existence de ces bocages. L'apparition des tracteurs, des grandes machines et la nécessité d'agrandir les parcelles pour faciliter l'accès et les manoeuvres de ces engins agricoles dans les champs, vont être la cause de la destruction de nombreuses haies.
1940 - La mécanisation agricole en Bretagne


Aujourd'hui se sont d'autres préoccupations qui poussent les communes à financer des programmes de réhabilitation du bocage par des actions de plantation. Si à l'origine les haies sont plantées pour délimiter les propriétés agricoles et pour contenir les bêtes, nos contemporains lui portent d'autres vertus, notamment en faveur de la biodiversité mais aussi pour lutter contre l'érosion des sols et la pollution.


Pourquoi préserver le bocage ?


Les intérêts des talus et des haies sont multiples et l'on peut identifier plusieurs fonctions au bocage:
  • la régulation du climat, la régulation hydraulique, la conservation des sols, une fonction de production, l'amélioration du cadre de vie et le maintien d'équilibre interspécifique.
  • Le bocage et notamment les haies qui le composent, joue un rôle de régulateur microclimatique. L'été, les haies offrent de l’ombre et son évapotranspiration augmente la sensation de fraîcheur ce qui restitue une formation plus durable de la rosée. Du printemps à l'automne, les haies captent la chaleur et la redistribuent progressivement. Enfin, l'hiver et pendant les nuits, les haies permettent de réduire les sensations de froid en limitant les vents.  En effet, une haie de 1 m de haut peut protéger du vent les 10 m de sols suivants celle-ci.
  • Le bocage possède aussi des avantages en matière de préservation des sols en réduisant le ruissellement des eaux lors des pluies et diminuant la force du vent, il permet de ralentir l'érosion des sols. 
  • De plus, son action sur l'écoulement des eaux régule le cycle hydraulique puisqu'il facilite l'infiltration de l'eau au niveau des racines et contribue ainsi à l'alimentation des nappes phréatiques. De ce fait, le bocage limite les risques de sécheresse et d'inondation.

Circulation de l'eau et contrôle de l'érosion dans un paysage de bocage - d'après CERESA 1987

Quelles actions mettre en place ?


Aujourd'hui, il existe plusieurs façons de participer au maintien et au renouvellement du bocage de nos campagnes. Les pouvoirs publics et en particulier les collectivités locales se sont mobilisées ces derniers années pour mettre en place différentes actions en faveur d'une revalorisation du bocage de leur territoire.
Ainsi, plusieurs programmes de reconstitution du bocage ont vu le jour sur nos territoires. Le plus souvent, il s'agit de programme de type "partenariat" entre le fond agricole pour le développement rural, les conseils régionaux, les conseils généraux, les agences d'Etat et les collectivités locales. Ces partenariats prennent en général en charge le financement de différents travaux tel que la création de talus, des haies, l'amélioration du potentiel hydraulique et un entretien du bocage sur un temps donné.

La France Sauvage - La Bourgogne et les secrets du bocage


Au mois de septembre la chaîne ARTE proposait une série de documentaires sur l'importance et la richesse de la nature sur notre territoire. Cette série "La France Sauvage" vous emmène, région par région, dans un voyage exceptionnel au coeur de la vie sauvage, un hymne de la biodiversité en France, à voir absolument. Je vous propose sur ce blog de visionner l'épisode "la Bourgogne et les secrets de son bocage". Un documentaire réalisé par Frédéric Febvre et Augustin Viatte.



Plus d'infos :



A bientôt


mercredi 13 juin 2012

Réglementation - La Taxe Locale sur la Publicité Extérieure

La TLPE, une taxe en lutte contre la pollution visuelle, une aubaine en temps de crise ?



Depuis le 1er janvier 2012, les enseignes de plus de 12m² sont taxées sur la pollution visuelle liée à la publicité extérieure. Il s'agit d'une mesure incitative qui invite commerçants et entrepreneurs à limiter les excès liés à certaines enseignes de magasin.



La taxe locale sur la publicité extérieure


La taxe locale sur la publicité extérieure (TLPE) est une taxe unique qui remplace les taxes locales sur la publicité jusqu’alors applicables.

Les trois taxes locales remplacées sont :

  • la taxe sur la publicité frappant les affiches, réclames et enseignes lumineuses (TSA, ancien article L. 2333-6 du CGCT),
  • la taxe sur les emplacements publicitaires fixes (TSE, ancien article L. 2333-21 du CGCT), 
  • la taxe sur les véhicules publicitaires.

Le régime des taxes locales sur la publicité a fait l’objet d’une refonte totale par l'article 171 de la loi de modernisation de l'économie



Une recette complémentaire pour des collectivités en recherche de financement


Aujourd'hui, nombreuses sont les collectivités qui sont à la recherche de nouvelles recettes en période de crise. La taxe locale sur la publicité extérieure vise en priorité les grandes enseignes, par conséquent le tissu de petits commerçants reste protégé. Seule les grandes enseignes sont mis à contribution, ainsi une collectivité de 100 000 habitants peut espérer obtenir une nouvelle recette fiscale d'environ 1 000 000 d'euros par an.


L'affichage publicitaire dans l'oeil du cyclone - illustration Figaro - 11/03/2011


Une taxe parfois difficile à mettre en place


En amont de la mise en place de cette taxe, la commune ou la collectivité doit réaliser un ensemble d'actions afin d'assurer une application réussie de cette mesure. 
Tout d'abord, il faut savoir qu'une délibération du conseil municipale ou communautaire doit avoir lieu en amont de sa mise en place. En effet, la TLPE nécessite une délibération avant le 1er juillet de l'année N pour qu'elle soit applicable l'année N+1. Par exemple, si une collectivité décide de mettre en place cette mesure au 1er janvier 2013, une décision du conseil doit être votée avant le 1er juillet 2012.

Les nouvelles surfaces taxées via la TLPE - Illustration GOPub - 2011

Ensuite une série de tâches doit être réalisée par les agents de la collectivité si celle-ci ne fait pas appel à une société extérieure. Un diagnostic minutieux doit être effectué, photo des  magasins et des emplacements publicitaires, un géoréférencement de l'ensemble de ces éléments, un calcul des surfaces taxables pour évaluer le montant à payer pour chaque enseigne. Ensuite, une campagne de communication auprès des enseignes n'est pas à négliger afin de les informer de la mise en place de cette mesure et du montant de leur prochaine redevance. Enfin, il préférable d'anticiper d'éventuels litiges et de préparer sa défense dans le cas d'un recours en justice. L'ensemble de ce travail peut-être effectué par une agence extérieure.

Exemple: la commune de La Mézière


La commune de La Mézière près de Rennes en Ille-et-Vilaine se prépare à mettre en place cette taxe. Un article du quotidien Ouest-France daté du 1er juin 2012, nous offre un aperçu de cette application. ( consulter l'article


vendredi 8 juin 2012

Urbanisme - A Motor City, l'agriculture s'invite en ville

Détroit - Quand l'agriculture s'approprie la ville...

Autrefois capitale de l'industrie automobile Américaine, Détroit se réinvente aujourd'hui et voit apparaître, ces dernières années, sur ses friches industrielles et immobilières, l'émergence d'une nouvelle génération d'urbainculteur. Voici le sujet que je vous propose cette semaine.


Détroit, ancienne capitale Industrielle

Détroit située au Nord des Etat-Unis et principale ville de l'Etat du Michigan, comptait 713 777 habitants en 2010 contre 1 849 568 habitants dans les années 50. Cette diminution démographique est la conséquence directe du déclin industriel de la ville amorcé à la fin des années 60.
Longtemps, l'une des villes les plus prospère des Etats-Unis grâce notamment à l'effervescence de l'industrie automobile au début du XXème siècle, Détroit est aujourd'hui confrontée au départ de sa population et à une augmentation croissante des friches industrielles et des quartiers résidentiels à l'abandon. La municipalité de Détroit va connaître de grandes difficultés financières dans les années 90 et être dans l'incapacité d'inverser la tendance.



Aujourd'hui, les finances de nouveau au vert et une industrie automobile épaulée par l'Etat fédéral permettent à la ville de relever la tête et de penser à nouveau à l'avenir.
De son côté, la population de Détroit tente de contrer ce déclin par une reconquête de ses espaces abandonnés, autrefois lieu de l'industrie ou résidence des ouvriers, pour les mettre à la disposition de l'agriculture urbaine.
Quartier Est, Detroit, 2008, photo de J.Griffioen

Urbainculteur dans la ville de Detroit, 2012, photo de G.Roden


L'urban ferming, un projet durable ?

Depuis 2003, de nombreuses associations ont vu le jour à Détroit; leur objectif commun le développement de l'agriculture urbaine à Détroit. Pour réussir ce projet et mettre toutes les forces en commun, ces associations se sont regroupées sous le collectif "Garden ressources".
Aujourd'hui, le collectif gère près de 800 jardins répartis dans toute la ville, principalement dans des zones résidentielles et de friches industrielles. L'objectif du collectif est de pallier aux difficultés sociales rencontrées par la population en restituant du lien social et une activité pour les plus démunis, dans une ville touchée de plein fouet par les plans de restructuration de l'industrie automobile. Pour cela, les associations de ce collectif dispensent des cours de jardinage et distribuent des semences en échange d'une cotisation annuelle d'environ dix dollars.
A la suite de son déclin, Détroit est devenue un désert alimentaire. En 2010, on pouvait compter 5 épiceries et le dernier supermarché venait de fermer ses portes. Se nourir est devenu un véritable défi et il était plus facile de se procurer de l'alcool que des pommes de terre. Ce constat alarmant a poussé le collectif à agir dans ce secteur. Ainsi, il décide de mettre en place le "Eastern Market", un grand marché couvert destiné aux produteurs  locaux de légumes et de produits frais. Cette initiative permet aux habitants d'écouler leurs récoltes et de réaliser un  peu de profit grâce à leurs productions.



Ashley Atkinson responsable de l'organisation agricole "the greening of Detroit" insiste sur la nécessité d'un bénéfice pour le producteur afin de permettre un développement durable de ce projet. D'autres associations comme "Urban Farming" mettent un point d'honneur sur la condition du libre accès de leurs parcelles pour permettre à toute personne en difficulté de se nourir.
Ces initiatives associatives ne sont pas les seules, on voit apparaître dans la ville des jardins de quartier sous forme communautaire. D'autres habitants rachètent des lotissements entiers pour développer une activité agricole et en faire une profession. Récemment, le financier John Hantz a proposé à la municipalité un projet de grande exploitation agricole commerciale sur 28 hectares avec à la clef des centaines d'emplois.

Des autorités perplexes puis séduites...

Projet de John Hantz à Detroit
Aujourd'hui, la mairie tolère cette nouvelle activité économique, en proposant des baux de un an à la population. Marge Winters responsable-adjoint de l'aménagement du territoire de la ville, précise la volonté de la ville de garder la main sur ces terrains afin de les proposer à l'avenir à d'éventuels investisseurs. 
Cependant, les derniers projets agricoles proposés à la ville, notamment celui de John Hantz, semblent inciter la municipalité à suivre cette voie. De plus, en 2011, la Maison Blanche s'empare du sujet et décide d'encourager financièrement ce type de projet dans son plan de relance économique. Fin 2011, le département de l'agriculture offrait des bourses au collectif "Detroit Agricultural Network", qui ainsi se voit récompenser pour ses initiatives et reçoit des bourses pour ses futurs projets de la part du département national de l'agriculture. 
Aujourd'hui, Détroit continue sa croissance agricole et recense 1200 jardins agricoles (début 2012). Un chiffre qui va certainement encourager les autorités locales à soutenir ce type d'initiative associative en passe de devenir une activité modèle de la ville.


Détroit a-t-elle trouvé une issue à son déclin ? Saura-t-elle reconquérir une population et reconstruire une dynamique pour enfin retrouver les chemins de la croissance? L'agriculture locale, solution du déclin industriel, l'avenir seul nous le dira...

plus d'infos:

http://greeningofdetroit.com/



samedi 26 mai 2012

Lecture - Urbanisme et architecture

Urbanisme & volupté - La France pavillonnaire enchaînée de B.Kalesky et E.Poënces

Pour ce week-end qui s'annonce ensoleillé, je vous propose une petite lecture sur la planification urbaine et sa règlementation parfois complexe. Bon week-end à tous et bonne lecture.

Bernard Kaleski, architecte-urbaniste


Bernard Kaleski est un architecte-urbaniste né dans les années trente à Tunis. Pionnier dans le développement durable, il propose déjà dans ces travaux d'étudiant des solutions incluant les énergies renouvelables. En effet, lors de ces études en architecture il imagine une maison  du soleil équipée de chauffe-eau solaires. De plus, Bernard Kalesky a toujours laissé une grande place à l'expression de la population en quête de "formes où vivre" dans ses projets.
Récemment, Bernard Kaleski a fait don à la Ville de Fougères (35) de l'ensemble de ces documents de travail. Une présentation de ces principaux projets a été réalisée aux archives de Fougères en début d'année. Je vous invite donc si la curiosité vous agite, de vous rendre à ces archives municipales et de consulter ces différents travaux passionnants.
Il a acquis la certitude que la compréhension des choses doit être multiple : un arc de Triomphe est aussi source de courant d'air... 


Urbanisme et volupté



Cet ouvrage nous présente une méthodologie et une interprétation des règlements d'urbanisme pour réconcilier l'homme avec son cadre de vie. 
Comment casser ce paradoxe qui fait que nos villes ne se développent généralement qu'à travers de ternes banlieues sous la forme de lotissements stéréotypés ? Comment renouveler les voluptés architecturales de nos citées anciennes ? 
Comment adapter nos communes aux besoins de demain ? 
Vous trouverez dans cet ouvrage des éléments de réponse à ces différentes problématiques.

Un ouvrage d'urbanisme à posséder absolument !


vendredi 11 mai 2012

Urbanisme - Gaston Bardet et les cités-jardins

La cité-jardin de Bardet à Le Rheu : un urbanisme novateur et humain

Aujourd’hui, c’est dans la commune de Le Rheu à proximité de la métropole Rennaise que je vous propose de découvrir une « cité-jardin » réalisée dans les années 60. Expérience singulière et novatrice à son époque, cette réalisation est le résultat d’une rencontre et d’une complicité entre un élu, Jean Chatel, et un urbaniste, Gaston Bardet.


Le concept de "Cité Jardin"


Schéma logique d'une cité jardin - E.Howard
Chestnut Grove, New Earswick près de York - cité jardin de Raymond Unwin - début XXème siècle.


Les cités-Jardins sont nées à la fin du XIXe siècle, pour répondre aux différents problèmes de pollution ainsi qu'aux problèmes sociaux des villes industrielles. 
Si c’est un certain Raymond Unwin qui réalise les premières cités-jardins à proximité de Londres au début du XXème siècle, c’est Ebenezer Howard qui va théoriser cette conception de cité-jardin en 1898 dans son ouvrage « Tomorow: a peaceful path to real reform ».
Ce nouveau concept de cité-jardin a pour objectif de créer un nouveau type de ville planifiée et amener la campagne à la ville. 
Pensées en Angleterre, ces cités vont apparaître en France rapidement avant la première guerre mondiale et connaître un nouvel essor après ce premier conflit dans les années 20.

Les lotissements des années 60


Architecte Jean Ginsberg - le Grand Ensemble de la Pierre Collinet à Meaux - construction 1959-1969
Le lotissement du Grand Duc à Proville - 1970
Témoignages d'habitants des grands ensembles de Mont Mesly à Créteil - 1970


A la libération en 1945, la France se reconstruit et se modernise à travers un nouveau mode architectural et une nouvelle politique urbaine : le logement collectif et « Les grands ensembles ».

Cette nouvelle politique urbaine répond à l’explosion démographique et à l’exode rural que connaît le pays à cette époque. Cependant, elle est rapidement critiquée par les populations et crainte par les hommes politiques car il apparaît dans ces quartiers, un risque de contestation et d’explosion. Enfin, l’augmentation du niveau de vie des Français va se traduire par la volonté de plus en plus d’habiter une maison individuelle. Les villages en proximité immédiate des zones urbaines vont alors connaître une vague d'urbanisation. Celle-ci va s’opérer souvent sous la forme de lotissements uniformes, c’est-à dire une simple division parcellaire répartie de chaque côté de plusieurs rues parallèles. C’est ce type de lotissements qui va voir le jour dans un premier temps à Le Rheu. Cependant, le maire très déçu du résultat va chercher à créer un modèle d’urbanisation plus adapté à son projet.


La cité jardin du Rheu, l'oeuvre d'une rencontre


C’est en 1953 que Jean Chatel devient maire de la commune Le Rheu. A cette époque, la capitale bretonne Rennes connaît un développement économique exceptionnel. Elle voit s’implanter à l’ouest de la ville une usine de fabrication automobile « Citroën ». Ce développement économique s’accompagne d’un afflux de main-d’œuvre qu’il faut loger. Naît alors les quartiers de grands ensembles Rennais tels que Cleunay, Maurepas, Villejean, puis le Blosne.

A cette même époque, Jean Chatel réalise son premier lotissement selon un modèle classique mais il est rapidement déçu par le résultat. Le maire réfléchit à d’autres solutions et découvre l’œuvre « Le nouvel urbanisme » de Gaston Bardet. Il prend rapidement contact avec cet urbaniste. Gaston Bardet est avant tout un théoricien reconnu qui a rarement eu l'occasion de mettre en application ses idées. C’est la naissance d’une collaboration de 10 ans qui débute, lorsque Gaston Bardet accepte la proposition du maire de Le Rheu et s’installe dans sa commune en 1956. Quand Gaston Bardet pose le pied pour la première fois à Le Rheu, ce petit bourg rural ne compte alors que 900 habitants. En accord avec le maire de la commune, Gaston Bardet devient rapidement l'urbaniste conseil de la commune et propose un schéma d’urbanisation pour la commune.


Gaston Bardet, théoricien de l'urbanisme "culturaliste"


Gaston Bardet (1907-1989)
Gaston Bardet présentant le plan de Vichy en 1939

Urbaniste français de niveau international, Gaston Bardet est diplômé de l’institut d’urbanisme de Paris en 1936. En 1940, il devient directeur du laboratoire d’enquêtes et d’analyses urbaines. C’est à cette époque qu’il développe des méthodes pour analyser des structures sociales. Fait prisonnier en 1940, il s’évade trois jours après sa capture. Dès 1941, Bardet rédige et publie son premier ouvrage « Problèmes d’urbanisme ». Cet ouvrage sera suivi après la guerre de « Pierre sur pierre » en 1947, « Le nouvel urbanisme » en 1948, et « Mission de l’urbanisme » en 1949. Tous ces ouvrages expriment les bases d’une nouvelle vision de l’urbanisme, un urbanisme humain. En 1948, Gaston Bardet dirige un groupe de réflexion sur l'Habitat, l'Urbanisme et l'Aménagement des Campagnes pour l’Organisation des Nations unies. Par la suite, il enseignera « le nouvel urbanisme » dans différents pays du monde et dirigera jusqu’en 1973, les études de l’Institut international et supérieur d’urbanisme appliqué de Bruxelles. Toute sa vie, Gaston Bardet s’opposera au modernisme et à l’aliénation qui découle de l’urbanisme fonctionnaliste promu par Lecobusier.

La cité-jardin de Gaston Bardet à Le Rheu


La première étape du travail de Bardet va être de stopper l’urbanisation croissante autour de l’axe routier principale traversant la commune (N24) et de reconcentrer son développement autour de son bourg. Ainsi, le schéma de développement du bourg réalisé par Bardet va permettre à la commune de Le Rheu de redonner une forme urbaine originale, avec autour d’un centre bourg respecté, une ville pavillonnaire en « échelons-gigognes » qui encadrent des équipements collectifs. L’objectif fondamental de Gaston Bardet est de maîtriser le développement urbain sur la commune et ainsi éviter le désordre urbain. Son second objectif est de favoriser et de concilier le lien social, l'aménagement intelligent des axes de circulation, et la mise en place d'un cadre de verdure.

Les trois échelons réalisés par Gaston Bardet - Le Rheu - 1959-1967

Il organise son schéma de développement en cinq projets d’urbanisation. Seulement les trois premières étapes de son schéma seront réalisées par lui, à savoir : le lotissement Ouest, Est et Nord. 

Sa première réalisation est la création du lotissement Ouest en 1959.Il poursuit son travail en 1964 avec le lotissement Est et réalise le lotissement Nord dit « le lotissement des sports », en lien avec ses équipements en 1967 avant de quitter Le Rheu.



Ces trois lotissements ont été fondés autour de plusieurs principes:
Les axes de circulation ont un rôle majeur et structurant dans la réalisation de ces lotissements. La mise en place de voies rayonnantes à partir du centre bourg et circulaire entre les différents lotissements doit permettre une fluidité et la création de liens entre ces différents espaces de vie. De plus, Gaston Bardet réfléchit à la place du piéton dans la commune et réalise un réseau de sentiers piétons traversant les îlots bâtis et reliant les nouveaux quartiers au bourg de la commune.


En ce qui concerne la réalisation des maisons, Gaston Bardet privilégie les matériaux locaux. Il organise ces constructions en rangées avec un souci de mixité sociale. En effet, il propose dans ses lotissements, des parcelles plus grandes avec des maisons plus cossues à l’angle des rues. Son objectif est de réussir à faire cohabiter différentes catégories sociales autour des équipements collectifs et des espaces publics afin de favoriser la vie de voisinage.



On remarque chez Gaston Bardet un grand souci du détail, cela se traduit par plusieurs éléments dans ses lotissements. Tout d’abord, il va dessiner les plaques de rue et utiliser comme support la céramique. De même, il va choisir une palette de couleurs pour les volets des maisons et va dessiner les clôtures qui délimitent les parcelles. De la verdure va être intégrée à ses lotissements tout en conservant au maximum les haies bocagères et les arbres existants.

Enfin, il emprunte aux cités-jardins anglaises le concept de « close » qui est une petite placette fermée par les îlots de maisons et offrant ainsi du calme, de la verdure et de la sécurité pour les habitants. Ces squares fermés, ont la particularité à Le Rheu de porter le nom des arbres qui y sont plantés, ainsi on retrouve la place des Acacias ou encore la place des Tilleuls. Gaston Bardet a marqué durablement le paysage et l’identité de la commune.
En 1967, intervient un changement au sein de la municipalité, Gaston Bardet est mis à l’écart et ne peut terminer son programme. Quelques mois plus tard, il décidera de quitter Le Rheu. La suite de son travail sera réalisée par un autre urbaniste mais tournera le dos aux concepts de Bardet.


Avenue des Bruyères - Le Rheu - Google 2008

Panneau de rue de la Cité Jardin - dessiné par G.Bardet sur céramique




Les réalisations de Gaston Bardet démontrent à l’époque que le pavillon n’est pas synonyme de gaspillage foncier et que ce type d’urbanisation peut-être maîtrisé. Aujourd’hui, le thème de cité-jardin n’est plus employé, cependant ce concept demeure la base de l’idéologie de la ville nature ou de la ville archipel, une forme de continuité des principes d’urbanisme de Gaston Bardet.

Je vous incite, si vous êtes de la région ou de passage en Bretagne, à venir découvrir ces lotissements des années 60 et de poursuivre votre ballade dans les autres lotissements plus contemporains de la commune…Nostalgie garantie...

A voir...


Documentaire "Rue des Mésanges" (2002)


Philippe Baron a toujours eu du mal à dire d’où il vient. Est-ce la ville ? La campagne ? Il a grandi rue des Mésanges, à Le Rheu, en Bretagne. Mais qui a pu avoir l’idée de donner un nom d’oiseau à la rue où il a passé son enfance ? Pour répondre à ces questions, vingt ans après, il revient vivre au Rheu et découvre qu’il y a eu là, dans les années 60, une expérience d’aménagement périurbain…A travers des rencontres avec ses voisins, des retrouvailles avec ses anciens camarades de lycée, en utilisant des films super 8 inédits, Philippe Baron nous propose un portrait intime d’une “ villette ” qui semblait ne pas avoir d’histoire.

Coproduction Vivement Lundi ! / France 3 Ouest / TV Rennes 
en association avec France 5 avec la participation de la Région Bretagne, du CNC, de la DRAC Bretagne, du Conseil général d’Ille-et-Vilaine et de la PROCIREP.



mercredi 25 avril 2012

Transport - Histoire de Tramway

Le Tramway aux Etats-Unis: l'histoire d'une disparition



Tramway de Toronto

Campagne "tramway à Montréal"



Si aujourd’hui, on observe un retour en force du tramway en occident, il y a quelques années celui-ci disparaissait de nos villes au profit de la voiture. 
Prenons le cas des Etats-Unis, jusque dans les années 50 de nombreuses villes comme New York, Los Angeles ou Philadelphie possédaient un réseau de Tramway avec de nombreux usagers, preuve de la solidité de son implantation. Cependant, à partir des années 20-30, ce système de transport va être confronté à un adversaire redoutable qui va entraîner sa chute et son remplacement par d’autres solutions moins efficaces et extrêmement coûteuses.

Un adversaire puissant : l’industrie automobile




Alors que les réseaux de tramway sont solidement implantés dans les villes américaines, les industriels de l’automobile vont s’appliquer à les démanteler.

A partir des années 20, les industriels de l’automobile veulent promouvoir la voiture individuelle dans le seul objectif d’augmenter les ventes et leurs profits. C’est alors que plusieurs industriels comme la General Motors, Firestone et la Standard Oil de Californie vont s’allier et mettre en place une stratégie offensive pour imposer à l’opinion publique une solution de transport urbain polluante, inefficace et extrêmement coûteuse.

Dans un premier temps, ils vont mettre en place une entreprise « écran » : la « National City Line ». Cette entreprise gérée par ces industriels va avoir comme principale tâche de racheter les sociétés de transport en commun de douzaines de municipalités. Une fois ces compagnies de transports sous leur contrôle, leur seconde action est de remplacer l’ensemble du parc de tramway électrique par des bus de la marque « GM »…
Compagnie Pacific Electric Railway, victime de cette stratégie
Tramway de Saint-Louis: voiture de 1947
Pile des voitures rouges mythiques de la Pacific Electric, Terminal Island, Los Angeles
Autobus "GM", 1955

Un lobbying efficace…


Présentation de la ville de demain selon General Motors en 1939
Publicité bus New-York, 1935


Cette politique de rachat et de remplacement va être accompagnée d’une action politique. Cette action va être menée par la « National Highway Users Conference », groupe de défense représentant de nombreuses entreprises dans le secteur de la construction automobile et de la route, fondé par « GM » en 1932. 

Ce groupe va réussir un double pari à cette époque. Ils vont tout d’abord réussir une campagne de communication sur la promotion du développement du réseau routier comme solution à la congestion et à la sécurité. Leur second succès va être fatal aux réseaux de tramways électriques dans 45 villes nord-américaines. Ils vont réussir à faire valoir auprès de l’autorité fédérale que toutes les recettes de taxes sur les carburants aux États-Unis soient réutilisées pour financer des projets routiers. 


Ce lobbying va permettre aux industriels de l’automobile et du pétrole d’asseoir leur monopole et ainsi assurer l’avenir de leur industrie pendant plusieurs décennies.

Une conspiration découverte en 1949


Les autorités vont découvrir le complot seulement en 1947, après trois décennies pendant lesquelles les réseaux de tramways vont s’effacer au profit de la voiture et des autobus. 

En 1949, après un procès de deux ans, ces industriels ont été reconnu coupable de complot et de conspiration pour volonté de monopoliser les transports en commun aux États-Unis. Chaque industriel a écopé d’une peine de 5000 $ d’amende…

En contre partie, cette stratégie de démantèlement a payé et permis aux industriels de développer leurs profits de quelques millions de dollars…


Ancien siège de GM, le "Cadillac Place", 1923

SIège actuel de GM, Le " Rennaissance center ", 1977

Aujourd'hui…


Alors que de nombreux Etats tentent de répondre au défi du changement climatique et à la réduction d’émission des gaz à effet de serre, quand est-il de leur rapport avec les industriels ? Comment ces industriels préparent-ils l’arrivée de l’énergie électrique dans nos voitures ?



Petite lecture:



RÉSUMÉ DU LIVRE


Un document édifiant où l'on apprend que la propagande politique au XXe siècle n'est pas née dans les régimes totalitaires, mais au coeur même de la démocratie libérale américaine.



E.BERNAYS, "Propaganda", Edition La découverte, 144p, 2007.

Petit bonus:

Un document vidéo de l'époque qui vous présente la vision de l'avenir selon General Motors...


samedi 21 avril 2012

Architecture - Le New Way Mabilais


La Mabilais: un quartier, une œuvre...



Si vous habitez à Rennes ou si vous fréquentez régulièrement la capitale bretonne vous avez certainement déjà remarqué dans le paysage urbain, notamment pour sa "soucoupe volante", ce bâtiment aux lignes modernes.

Il était une fois...


Construit en 1976, Le bâtiment de La Mabilais incarne le nouvel élan de modernité de la Ville de Rennes à cette époque. 

Dessiné par l'architecte et urbaniste Louis Arretche, ce bâtiment est destiné à accueillir le centre des télécommunications de Rennes. 

Louis Arretche reçoit un nombre de commande publique considérable pendant les Trentres Glorieuses. Il sera à l'origine à Rennes de multiples œuvres comme la salle omnisports « Le Liberté », les campus universitaire de Beaulieu et de Villejean, ou encore l'aménagement de la ZUP de Villejean en tant que conseillé urbaniste en collaboration avec l'architecte Henri Madelain. Il participera aussi à la réalisation de l'usine marémotrice de la Rance au début des années 1960. Ces différentes réalisations dans la capitale Bretonne et en France feront de lui un des architectes les plus prolifiques des Trentes Glorieuses.










Opération renouveau




Le site de La Mabilais est inoccupé depuis le départ des 500 salariés de France Télécom en février 2008 vers de nouveaux locaux. 



L'immeuble est aujourd'hui en cours de réhabilitation par le promoteur Ouest-immo et la livraison est prévue pour 2014. Tout l'intérieur du bâtiment a été entièrement désossé et les 1212 fenêtres que comportent l'immeuble vont être remplacées. En ce qui concerne l'aspect extérieur, la façade est actuellement en cours de nettoyage afin de redonner une nouvelle apparence au béton blanc. 

L'ensemble du bâtiment va être requalifié en bureaux, soit 14 500 m2 sur sept niveaux. Les locaux seront disponibles à la location ou à la vente pour des entreprises désireuses d'intégrer ce quartier en renouveau.Enfin, le projet de ligne B du métro envisage la réalisation d'une station à proximité du bâtiment, à l’angle des rues de Redon et Claude Bernard.

Une antenne contre une œuvre d'art... 








Cette semaine dans un article de Ouest-France, le quotidien nous apprenait les interrogations du groupe propriétaire du bâtiment au sujet du remplacement de l'antenne et l'utilisation futur de la mythique soucoupe.

En effet, si le groupe assure la conservation de la soucoupe et de ses 100m², il est aujourd'hui confronté à des problèmes d'exploitation de celle-ci pour des raisons de sécurité. En effet, la soucoupe est située à 30m du sol et au delà des 28m, on applique la réglementation des immeubles de grandes hauteurs et les contraintes deviennent trop onéreuses par rapport à son exploitation.

L’antenne, de son côté, va être en partie démontée. La partie métallique rouge et blanche devra céder sa place à une œuvre d'art dans les prochaines années. Seule la structure en béton de l'antenne, faite d'une mosaïque jaune et grise, sera conservée. Un appel d’offres pour la réalisation d’une œuvre d’art devrait être lancé ces prochains jours. Place à vos âmes d'artiste !!

Venez visiter du 14 septembre au 9 décembre


Le public aura accès à certaines parties de ce bâtiment à l'occasion de la prochaine biennale d'art contemporain, du 14 septembre au 9 décembre. C'est l'occasion de découvrir cette oeuvre architecturale originale.

Plus d'infos:
www.mabilais-newway.fr

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